Travail forcé dans la région Rhin/Neckar - un projet de l'école intégrée de Mannheim (IGMH)   

                                   


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Camp Diesterwegschule 2

   

François Braunn





né  à Moyenmoutier  



Travail Forcé dans l'usine Lanz, Mannheim
Camp: Diesterwegschule

 

 


François Braunn, l'été 2002 à Raon l'Etape -  pendant l'interview dans la maison de M.Chapelier

   

Déportation de Moyenmoutier à Mannheim

Le 8 novembre 1944, il pleut, il vente (neige fondue). 7 h: roulement de tambour dans la rue. C’est le corporal Baya: „Avis à la population. Tous les hommes âgés de 14 à 60 ans doivent se rendre sur la Place du village avec des vêtements chauds, des vivres pour 48 heures afin d’aller executer des travaux à 15 km du front...“ Bruit de combat,  dans notre famille, nous nous executons, havresac, pélérine, deux boîtes de thon ou sardines et un pain allemand de 1,5 kilos, mon père, mon frère et moi. Arrivés sur la place nous retrouvons tous les autres „hommes“ du patelin. Nous sommes mis en rang par trois par les Allemands, fusils mitraillettes, colliers de Feldgendarmerie, un „Wachs“, un grad (Major, paraît-il) se trouve sur le paroi de la Mairie et donne des orders, parlementé avec les autorités municipales, le caporal tambour revient de sa tournée avec son tambour sur le ventre, on le lui enlève et on le lfiche dans les rangs, sans affaire, sans sac à dos, sans manteau. Le temps qu’ils nous comptent et nous recomptent on lui apportera le nécessaire (sa femme).
 
„Eins, zwei, drei! Eins zwei drei!  Zu jung! Zu alt! Weg!  Krank, weg!“

Ils pleut et il vente toujours et vers 10h00 nous mettons en route, vers Le Paire, - un soldat allemand armé, tous les cinquante mètres environ.
Avant Le Paire, un homme est assis sur le bord de talus,  il n’en peut plus, il a mal au pied et marche difficilement, -Gaston Gérard -, il est laissé...
Pontion, Hurbache -, halte devant l’église, regroupement et tout d’un coup dans un étourdissant sifflement des obus s’abattent vers la droite du patelin, sur les maisons,  cris, tout le monde se fourre partout où l’on peut s’abriter, puis 2 ou 3 minutes après nouvelle rafale, 8 coup se comptent,  à nouveau sauve-qui-peut avec un groupe nous nous dirigeons vers le bois direction Denipaire et à nouveau: sifflements, éclatements et au moins 50 rafales de 8 coup que l’on peut compter au départ.
Ce sont les vieux de la guerre de 14 qui nous le font remarquer...

 

 

Anecdotes: Un soldat allemand à côté de moi tire Constant [nom de famille] caché sous sa pélerine „Los!“ et nouvelle rafale dans les sapins, le soldat allemand, comme nous -, courre, trébuche dans une racine, son collier de son fusil, dans la mélasse ... Robert Noel court: „J’ai reçu quelque chose entre mon parka et mon sac.“ C’est un éclat d’obus d’au mois 8 cm de long tout déchiqueté et tout chaud que lui brûle sa veste...
Et nous partons toujours sans les obus jusque l’entrée de Denipaire. Nous sommes un groupe au-dessus de la route, mon  père, mon frère et d’autres, nous voyons en  contrebas, regroupés, le maire Marcel Guy, Gaston Remy, instituteur. -
Que faisons nous? On se barre... Où, vers où, vers La Chapelle pour nous faire avoir, nous nous remettons dans le cortège, - St.Jean d’Ormont, La Petite Fosse et  Provenchères vers 18 h 00, il commence à faire nuit,on nous dirige vers la gare et on nous parque dans une usine où se trouvent déjà tous les hommes de Saint-Dié et des environs, ramassés comme nous. Il y a l’eau partout, par terre, nous montons sur des métiers à tissu et -, vers 22 h on nous fait embarquer dans des wagons. Le train s’ébranle tout doucement dans la nuit...

Saales, Fonday, Rothau, Schirmeck, arrêt d’une heure environ, puis nous repartons et arrivons vers 6h00 du matin à Mutzig où on nous fait descendre. Nous sommes parqués toute la journée dans les casernes au bord de la route de Strasbourg. Où allons nous? Dieu seul le sait. Vers 17 h00 nous remontons dans les wagons avec un pain allemand à chacun et un seau de confiture pour vingt hommes et nous roulons à nouveau [dans] la nuit. Nous passons le Rhin à Rhinau. On s'‘organise tant bien que mal, mouillés, trempés. Les vieux roulent leurs cigarettes, enfin ceux qui ont eu des feuilles, et nous voilà arrivent vers 7 ou 8 heures dans une ville: Mannheim Hauptbahnhof...

Ce que nous voyons alors... des ruines, des ruines. Sur les pans de murs et les immeubles encore debouts des slogans „Le Führer commande, nous obéissons!“ „ Vicoire à aucun prix!“ „Sieg Heil!“ etc. etc.

 

   

L'arrivée à Mannheim

Nous sortons des wagons et sommes dirigés vers un marché couvert. Combien sommes nous? 1000? 2000? – Là nous sommes reçus par une espèce de Croix Rouge que nous sert une soupe de flocons d’avoine, un peu aigre tout de même. Et là devant un parterre de civils allemands, pantalon de reloues, petit chapeau, nous sommes triés par corporation, des boulangers partent ici, des mécaniciens par là. Mon père, mon frère et moi, peintres de profession, avec d’autres dont les métiers n’ont pas été demandés, nous partons vers la banlieue sud de Mannheim. Nous traversons la ville, la gare et on nous parque dans un bâtiment, genre d’école désaffectée, combien sommes nous là encore -, 200, 300?
Et ...- vers 19 h 00 tout à coup: sirène. Nous comprenons vite, un bombardement... Nous qui voyons- depuis 1942 les avions alliés passent au-dessus de nos têtes. Je ne vous parle pas de la panique qui nous emporte, et quelle cavalcade! Vers un bunker avec la population allemande, femmes, gosses, étrangers, tout le monde se sauve et court et -, pour la première fois de ma vie je rentre dans un de ces fameux bunkers anti-aériens, une masse de béton, de 50 ou 60 m de haut, portes blindées et „chiens jaunes“, membre du Parti âgés, habillés en jaune, qui nous enfournent, Allemands, Français, Russes, Tchèques, Italiens et je ne sais qui d’autres.
Ce soir – là, pas de bombardement, nous sortons une heure plus tard, l’alerte est finie, les formations de bombardiers se sont dirigées vers Munique, Leipzig... C’est ce que nous avons entendu, par micro dans le bunker, moi mêlé, enfin une femme  qui serre ses enfants et ses sacs de vêtements ou de provisions et sa serviette.

 

Le travail forcé dans l'usine Lanz (aujourd'hui John Deere)

Dans la nuit on nous dirige vers un autre bâtiment, la fameuse Diesterwegschule, et on nous enferme dans des chambres es salles où des châlits sont déjà en place, tant de lits, tant d’hommes. Il fait nuit, il fait froid. Une petite couverture s’y trouve sur une paillasse de paille et là tout le monde s’endort.
Le lendemain nous sommes dirigés vers une usine sans nos fardeaux que nous avons laissés dans nos chambres bien barricadés.
A nouveau selon ce qu’il faut nous sommes à nouveau triés, mon père, mon frère et moi... et d’autres: direction la fonderie „Gießerei“ et là pendant deux mois, novembre, décembre, je dois démonter des carters de moteur de chars avec un Polonais et un Badoglio (militaire italien qui ne voulait plus combattre avec les Allemands) et mon père.
J’ai oublié de vous dire que nous travaillions dans une ancienne usine de tracteurs agricoles „LANZ“ qui produisait pour la guerre par la suite munitions etc...
7 h du matin, 6 h du soir, noir,  sale, treillé noir,   petite calotte noire et la cuillière dans la poche pour manger en ½ heure une soupe de légumes dégueulasse mais tout de même mangeable, de petit pois ou lentilles ou betteraves ou patates, servie par des femmes russes dans un hall pouvant contenir plus d’un millier d’âmes.
Le soir après l’usine, la douche après les Allemands, froide souvent avec de la "Waschpulver" qui irritait la peau.
Mi janvier, les deux fours Martin, sous l’effet du bombardement ne fonctionnant plus,.
Nous quittons l'usine Lanz... 

 

 

 

   

Le camp Diesterwegschule

On s'organise...
Il est vrai que dans ce détachement se trouvent tous les gendarmes et policiers der Saint-Dié.

         Le bâtiment de l'école "Diesterwegschule"

 

.
La vie dans la chambrée où l’on rentrait vers 18 h 00 s’écoulait avec une soupe un peu meilleure qu’à  l‘usine, un quart de pain de soldat, un petit carré de margarine et une rondelle de mortadelle ou saucisson.
Nous mangions de bon coeur, deux camarades qui travaillaient aux moteurs, Germain Laurent et Joseph Hoblinger [*1909] récuperaient du gazoil et avec une petite mèche confectionnaient des petits veilleurs.
Au moins une fois par semaine bombardement ou alerte et là il fallait voir ceux qui stoppaient la gamelle pour s’enfuir au bunker, à 200 m environ de l‘établissement dortoir. Il ne fallait pas tomber dans l’escalier, c’était sauve qui peut.
Et le 1er mars 1945 vers 15 h: „Vollalarm“! (pleine alarme) Le ciel est moutonné, on n’entend pas d’avions, il ne se passera rien, croyons nous. Nous n’allons pas au Bunker, nous sommes à peu près une cinquantaine dans l’immeuble. De toute façon on ne peut plus rentrer dans le bunker, il est touché. Et... la suite..., c’est l’apocalypse: 40minutes de bombardement. Nous les saurons par la suite: Le plus fort bombardement sur Mannheim par plus de 1000 avions. Nous sommes les uns sur les autres, pleins de poussière, dans le sous-sol.  Infernal... Puis tout se calme, il n’est pas 16 h, il fait noir comme à la tombée de la nuit. De Ludwigshafen il se dégage une fumée noire qui obscurcit tout le ciel. Nous remontons vers nos chambres: plus de fenêtres, les paillasse se sont envolées et il en a encore qui brûlent parce que des crayons incendaires sont aussi tombés.
Nous passons au moins plus de 8 jours sans travailler et à remettre tout en ordre. Plus d’eau, les feuillées de la cour où nous allons nous soulager sont complètement recouvertes de débris et de terre. Puis le travail reprend au dépôt de machines, les chasseurs piquent sur les voies et bombardent. C’est alertes sur alertes, il est vrai:  „qu’ils ne sont plus loins“. A l’ouest de Mannheim vers le Rhin nous voyons dans le ciel la nuit un grand  V  en faiscaux lumineux. Nous apprenons l’extermination de Worms de de Pforzheim incendiés au phosphore.

Changement de travail

Nous sommes dirigés par groupes à des travaux de déblaiement en ville. Un jour, on nous emmène, nous étions une vingtaine, vers Ludwigshafen,  – IG-Farben. Arrivés à un endroit nous creusons. Nous creusons pour avoir quoi? Pourquoi... C’est tout d’un coup stupeur! Nous donnons les derniers coups de pelle dans les ailerons  arrières d’une bombe d’une tonne environ encore non éclatée. Personne ne voulait plus descendre dans le trou, ce sont des tolards habillés en brun qui faisaient-, paraît-il -, ce genre de travail qui nous succèdent.
Une autre fois c’est au bord de l’autostrade Mannheim - Heidelberg où nous creusons de petits tranchés en équerre par... – moins 20 degrés. C’était dur, (au moins trente centimètres durs comme du béton) avant de trouver la terre meuble, et qu’est-ce qu’il faisait froid sous la bise. 

 

 

Le soir nous rentrions à la Diesterwegschule où nous nous rechauffons, et toujours: Voralarm! Vollalarm! La sirène, le Bunker, le feu partout dans les immeubles encore debouts et toujours rassemblés  par groupe pour aller transporter des sacs de farine ou d’orge d’un dépôt à un autre ou des déblaiements.
 
Puis un jour, une centaine d’hommes environs, nous partons vers Rheinau vers la gare de réparation de machines, locomotives „Rangierbahnhof“.  Là on nous demandait si nous voulons travailler sur les voies ou dans les ateliers. Me voici donc avec mon frère à travailler la nuit avec un „Meister“ (un contremaître) à faire de petites reparatures sur les locomotives, gratter un coussinet de bielles, raccorder des chaudi'ères crevés par les mitraillages de chasseurs alliés etc. Le jour nous rentrions à Mannheim par un petit train, puis 3 km à pied. 

 

Evacuation de Mannheim à Heidelberg

Camp "Baggerloch"
(au lieu de la gare centrale d'aujourd'hui)

Le 25 mars, dans la nuit, sac au dos. Combien sommes nous?  200-300 ou 400?  Nous partons direction Heidelberg, où nous arrivons vers 8h00 du matin. Nous sommes parqués dans des cabanes en bois avec des Russes du côté de la gare de triage, [= Camp Baggerloch], toujours encadrés par les gendarmes de Saint-Dié; plus d’Allemands, on ne voit plus de soldats.
 Ils ont disparus et nous..., nous continuons à nous ...seuls. Nous voyons fumer les Russes des cigarettes américaines, ils sont en train de piller les wagons en stationnement et sont tombés sur des colis de la Croix Rouge suédoise. Nous faisons donc de même et nous trouvons des colis de soldats avec des cigarettes, chaussettes etc.
C’est l’euphorie, mais un matin pour toujours pour dix Russes couchés avec une balle dans la tête, car les Allemands sont dans les voies et tirent sur tous les pilleurs.
C'était tout prêt, nous, on était dans la proche gare de Heidelberg. Il y avait plein de bagages des civils. Et là on était parqué dans des cabanes en bois. Et là il y avait un grillage de 2 m de haut et puis un trou dedans. On passait par le trou pour entrer dans la gare, pour visiter les wagons.
Et alors le deuxième jour..., il y avait [entre nous] des ouvriers d'usine, les anciens de 40, 50 ans -, ils ont trouvé un tonneau d'alcool, de schnaps. Ils l'ont roulé dans les rails au moins 100 mètres et l’autre jour, ils étaient tous fous. C'étaient des Français du Rabodeau. Je dis: les vieux parce qu’ils avaient 40 ans.
Je triais dans un wagon, moi de l'un côté, mon frère de l'autre. Et puis, vous savez si l’on trouve du tout  on n'a pas assez de place pour mettre ce que nous trouvions. Et  tout à coup on entend de tirer: boum! boum! boum! Mon frère crie: "Sauvons nous!“ Et il saute du wagon d'un côté, moi, je saute de l'autre côté du wagon avec ma musette pleine de biscuits, pleine de truques.
Et tout à coup une centaine de mètres derrière moi,  j'entend: "Halt!" Je me retourne et qu’est-ce que je vois? Un soldat allemand! Et: pa! Il avait tiré. Alors comme j'étais jeune j'ai courru et j'ai parti à quatre jambes sous les wagons en courrant, courrant, courrant...300, 400, 500 mètres pour me réfugier dans les cabanes. Quand je suis retourné en courant [de la gare de triage] j’ai cherché le trou et j’ai foncé(?) pour trouver le trou
Q: Vous avez vu des morts là à la gare de triage?
Oui, j'ai les vus mort, il en avait sept, huit... Je n'ai pas les regardés  _ _ ant. Je n’avais pas la tête..., ce n'était pas beau à voir. [A Mannheim] j'ai vu après un bombardement une femme russes avec les jambes coupées. Si l’on a vu ça...
Oui, oui, j'ai vu sept, huit morts dessous d'un pont, un pont qui enjambait les voies. C'était un pont, deux, trois kilomètres de la Hauptbahnhof. C'était là où j'ai pillé. Il y avait encore mon camarade de communion, il était avec moi. Mais il est mort maintenant. Au Rabodeau il y a plusieurs gens qui on vu ça.

 

   

La Libération

Puis du 2 au 4 avril plus rien, plus de bruit, le calme plat, des draps de lit blancs au fenêtres. Il est vrai que la ville de Heidelberg n’a jamais été bombardée.
Avec un groupe nous partons en ville ( 1 km environ), le matin quand nous sommes rentrés dans la ville de Heidelberg j'ai vu..., comment s'appelle la grosse place au centre de la ville à peu près? [=Bismarckplatz]  Nous sommes arrivés là et il y avait des soldats américains qui longeaient les murs. Il y avait d'autres qui phoquaient sur les trottoirs avec des mitraillettes en poing... Et alors je m'ai trouvé devant un char, un Patton, qui arrivait comme ça [imite le bruit]... impressionant - et la tourelle qui a tourné lentement...
Les Américains nous chassaient: "Go away!" Il nous chassaient et nous avons crié: "French! French!"
Nous comprenons alors que c’est fini, que le cauchemar est fini.

 

 

Interview M. Braunn l’été  2002 à Raon  (avec Conny Högner) pour un projet de vidéo

 

 

 


Et là, moi, je suis rentré dans le bureau du chef de gare de Heidelberg. Et là,  il y a eu un soldat américain  qui a lâché - derrière moi, - une rafale de mitraillette dans le tableau de Hitler qui était pendu au-dessus [de la place] du chef de gare et puis aussi dans une armoire qui était plein de casquettes [rouges].
Dans l'après-midi nous avons été encore à nouveau rassemblés et nous nous sommes dirigés vers l'hôtel Victoria qui était là. C’était la gare et il y avait tout prés un tunnel et puis à côté cet hôtel. Nous sommes montés dans l'hôtel Victoria.
Mais l'hôtel avait été déjà dévasté. Par qui? Par des Polonais, des Russes... Il y avait des instruments cassés, des violons, des saxophones... Moi, je suis musicien et cela me faisait mal au coeur de voir ça.
Nous avons visités les chambres, c'était un grand hôtel et c'est là que j'ai trouvé cela, que j‘ai gardé en souvenir.
Nous dormons dans les salons sur de bons matelas.Nous jouons au foot sur les pelouses et cela pendant une dizaine de jours.
Et puis nous, les jeunes, moi, j’avais 17 ans, on était toujours en train de chercher, de fouiller, de regarder... Et dans la cave de cet hôtel nous sommes tombés sur des vêtements sportifs de Hitlerjungen, des ballons de football, des souliers, des basquets, des petits gilets, des truques...
Moi, je suis  un type sportif. On a récupéré les ballons et de ce ballons, nous nous ont permis de jouer au football sur la  jolie pelouse de l'hôtel Victoria qui faisait 50 mètres de long avec des gars de Raon l'Etape dont Jacques Nilsa.
Puis nous embarquons dans des camions américains vers Strasbourg où nous sommes à nouveau parqués au Wacken. Là, désinfectage, renseignements, colis, identification et le 14 avril nous prenons le train jusque Saales où  les camions des divers villages où nous habitons nous rapatrient.
Moyenmoutier le 10 h du soir – les vacances forcées sont terminées.

   

 

 

Marcel Riotte                       

Né à Saint-Dié

 


Travail Forcé dans l'usine Lanz, Mannheim
Camp: Diesterwegschule

 

 

Marcel Riotte pendant une visite 
à Mannheim, l'été 2003

 

   

La déportation

En 1944 j’avais 20 ans bien sûr…Mon père était cultivateur, il n’avait pas de machine à l’époques là, il y avait des cultivateurs. Il avait une ferme près de Saint-Dié. Moi, je travaillais avec lui dans la cultivation, comme les Allemands m'ont déporté.
Q : Mais la maison de la famille  n’a pas été détruit.
Non, où je suis maintenant, je me suis marié à sept kilomètres de Saint-Dié, là le village a été tout à fait détruit, c’est Saulcy. C’était détruit tout sauf à un ou deux qui ont résistées.

 

 

 

 

Diesterwegschule

Moi j’étais chez Lanz, et dans la Diesterwegschule. Je ne sais plus le numéro de la salle de classe, c’était au rez-de-chaussez, sur le même palier que les gardiens. Il y avait des gardiens là bien sûr. C’était au bout,  pour nous diriger au moins un peu.

Mes amis n’étaient pas dans la même chambre, je ne sais pas comment, mais je me suis trouvé avec les policiers de Saint-Dié et le commissaire de police, il s’appelait Charlot à l’époque, il a su de s’évader. J’ai les entendu parler, ils ne nous racontaient pas tout, à nous autres.
Les policiers allaient travailler aussi, il y en a eu qui ont travaillé dans la cuisine du camp, mais pas tous.
Q : Et les dimanches libres vous avait quitté l’école ?
Oui on pouvait aller promener. Et ca allait quelques fois le soir on allait manger le « Stammgericht » dans un restaurant. C’était sans tiquet parce qu’on n’avait pas de tiquets.
On avait un peu de l’argent parfois, ils nous avaient donné des bleus pour travailler, et des chaussures, et il fallait les payer. C’étaient des « Holzschuh ».
Q : Les vêtements n’étaient pas donc le problème.
J’en avais pris de chez moi, alors on essayait de ménager un peu, de mettre une pièce quand il y avait un trou.

 

 

 

Le travail forcé chez Lanz

J’étais dans les fours pour tremper des piéces, des gros fours qui chauffaient au gaz. Le gaz venait de Zweibrücken. Quand il y avait un bombardement ca s’arrêtait automatiquement. Il fallait faire la reparation pour pouvoir refaire ou retourner les fours. C’était chauffé au gaz, la conduite coupée, le gaz n’arrivait plus. Le gaz venait d’une coquerie qui se trouvait à Zweibrücken.  Ce n’était pas un travail dur, pas trop, mais j’avais l’habitude de travailler. Les horaires, - c’étaient les six heures le matin jusque six heures le soir, une équipe, et l’autre équipe c’était six heures du soir jusque six heures du matin. Et les samedis et les dimanches on y tournait : On faisait six heures pour changer d’équipe.

l fallait bien y aller le dimanche, cela tournait en continu. Sauf quand il y avait des bombardements à la conduite on faisait autres choses. On était employé à d’autres endroits, on reparait un peu. Il y avait ceux qui en étaient des spécialistes, on les aidait.

Q : Il y avait un contremaître allemand ?

Avec moi ? Oui, il avait un allemand, déjà agé bien sûr, il était dans la guerre de 14, et puis un tchèc qui était un peu plus vieux que moi, un grand. A l’époque il m’avait dit : Quand il avait 20 ans il faisait 120 kilos. Alors bon il avait beaucoup maigri, c’est sûr, et lui, c’était sûrement un ouvrier spécialisé. C’était lui qui nous commandait. Il ne parlait pas le francais  pour nous – on parlait un peu l’allemand…

L'entrée (Tor 2) de l'usine John Deere, ancien LANZ, oú les Vosgiens passaient tous les jours

   

 Schwetzingen, usine de réparature Reichsbahn

Q : Et vers la fin du temps à Mannheim vous avez quitté Lanz ?
Oui, on était chez la Reichsbahn à Schwetzingen. Et puis pour finir quand les Américains sont arrivés on nous a laissé à peu comme ca. J’était dans la forêt dans la nuit, j’ai passé la nuit, il ne faisait pas trop froid, et on voyait les obus troncant quand ils passaient le Rhin.
C’était vers Heidelberg... Et alors les Américains sont arrivés, ils nous ont rassemblés. On a été rapatrié de Heidelberg, on a été à l’hôtel Victoria, et puis après ils nous ont amené dans une caserne, et de là avec des camions on est venu jusqu’à St.Avold avec des camions américains.